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[DEPECHE] Après le ralliement des Bogdanoff, Sarkozy teste « la science forte »

PARIS, FRANCE. Après l’annonce du ralliement inattendu des frères Bogdanoff, le moral était au beau fixe, vendredi, à l’UMP et au siège de campagne de Nicolas Sarkozy. « C’est un tournant de la campagne », confie un des dirigeants du parti. « Le soutien de ces deux sommités scientifiques et populaires, totalisant probablement à elles deux plus de 100 points de Q.I., vient à la fois crédibiliser la campagne de Nicolas Sarkozy, et casser la dynamique dont bénéficie François Hollande ». « La peur va changer de camp », se félicitait-on en début d’après-midi rue de la Boétie, où les experts planchant sur le futur gouvernement envisageaient déjà de découpler l’enseignement supérieur et la recherche pour donner un ministère à chacun des deux jumeaux.

« Ce soutien ne vaut pas que par lui-même », nous explique par téléphone un proche conseiller de Nicolas Sarkozy. « Après le ralliement de l’économiste Bernard Tapie et du climatologue Claude Allègre, il vient confirmer le basculement du camp du savoir et de l’intelligence en faveur du président sortant ». Un basculement qui pourrait rapidement retourner la tendance du vote des enseignants au bénéfice du compagnon de Carla Bruni, selon l’institut OPIF qui constate déjà un « frémissement » dans l’opinion professorale, même si « son sens reste à déterminer ».

 

Plus important encore, ces soutiens devraient permettre à d’autres intellectuels de se décomplexer et de faire rapidement un coming out sarkozyste, inconcevable il y a encore quelques jours seulement. Dans l’entourage du président, on ne se cache pas ainsi de travailler d’arrache-pied à convaincre d’autres savants, comme la sociologue Elisabeth Teissier ou le philosophe Eric Zemmour, d’intégrer le collectif d’intellectuels en formation autour de Nicolas Sarkozy. Un grand colloque-meeting serait également en cours d’organisation, sur le thème de la « science du peuple contre la science des élites et de la politicaille ».

 

Du côté des communicants de l’Elysée, on envisage de tirer les leçons qui s’imposent de ce « séisme au sein de l’intelligentsia ». Le slogan « La science forte » a commencé à être testé sur des groupes « quali », avec des résultats très prometteurs. « Ce positionnement correspond à une demande latente chez les Français », analyse l’institut OPIF. « Ils ne veulent plus de cette science stigmatisante, décourageante, incompréhensible, qui leur explique qu’ils doivent se serrer la ceinture s’ils veulent arrêter le réchauffement de la planète, ou que la Princesse de Clèves est un texte plus important que Quelqu’un m’a dit ». L’Institut souligne aussi la proximité entre Nicolas Sarkozy et les Frères Bogdanoff, tous étant victimes « d’un système incapable de comprendre les génies anticonformistes ».

 

Le lancement du slogan de la « science forte » devrait s’accompagner de propositions « décoiffantes », selon l’entourage présidentiel. La rédaction d’un rapport sur les « freins à la liberté de pensée » va être confiée conjointement à Claude Allègre et aux Frères Bogdanoff, avec à la clé des mesures que l’on nous promet « révolutionnaires », comme la co-gestion du CNRS par les usagers ou l’obtention automatique du titre de professeur des universités à partir d’un certain nombre d’heures de présence télévisuelle. Une audace qui risque de faire parler, dans un pays encore majoritairement « sclérosé et enfermé dans une conception austère et rigoriste de la science ».

 

Romain Pigenel, pour l’Agence Variae

#JournéeDeLaFemme : hommage à une victime de Sarkozy

En cette occasion très particulière de la Journée internationale des droits des femmes, où il est d’usage à la fois de fêter ces droits, mais également de faire un bilan sur les avancées restant à accomplir, je souhaiterais partager avec vous une pensée émue pour une femme que nous ne devons pas abandonner aux ténèbres de l’oubli.

Une femme trompée, instrumentalisée, une femme qui a été le jouet d’un homme peu scrupuleux. Un homme qui, sans même lui montrer le respect élémentaire que l’on doit à tout individu, l’a rejetée et bafouée une fois qu’elle ne lui servait plus.

 

Un homme dont la position socio-professionnelle nous rappelle que la maltraitance envers les femmes touche tous les milieux, toutes les classes sociales.

 

Un homme qui essaiera sans doute à nouveau de berner d’autres naïfs et naïves dans très peu de temps. Ce qui justifie, aujourd’hui, de le dénoncer en même temps que nous commémorons le calvaire de sa victime.

 

Sa victime : je veux parler de la proposition en page 9 du programme présidentiel 2007 de Nicolas Sarkozy : « Dès le mois de juin [2007], je réunirai une  conférence avec les partenaires sociaux afin que l’égalité salariale et professionnelle entre les femmes et les hommes soit totale d’ici 2010. ».

Programme Sarkozy

De conférence il n’y eut, pas plus que d’égalité, la proposition étant oubliée sitôt le mariage avec Marianne consommé. Et probablement Nicolas Sarkozy nierait-il la connaître si vous lui en parliez aujourd’hui.

 

Des femmes comme elles, abusées, trahies, trompées, il y en a encore trop. Et combien d’autres jeunes propositions innocentes, prêtes à être manipulées par le même malotru, en cette période électorale ? Alors, pour leur honneur à toutes, et pour racheter le manque de parole d’un homme, parlez d’elle autour de vous, faites vivre son histoire.

 

Pour que plus personne ne puisse dire : « je ne savais pas ».

 

Romain Pigenel

Pourquoi Sarkozy envisage-t-il sa mort politique ?

(Demi-) scoop : le Nicolas Sarkozy est un animal politique périssable. Et c’est lui-même qui le dit, invité de RMC et BFM TV. « Si les Français devaient ne pas me faire confiance, est-ce que vous croyez vraiment que je devrais continuer dans la vie politique ? La réponse est non […] je dis aux Français je me battrai de toutes mes forces pour avoir votre confiance, pour vous protéger, pour vous conduire, pour faire la France forte, mais si tel n’est pas votre choix, je m’inclinerai et c’est ainsi et j’aurai fait une très belle vie politique ». Demi-scoop seulement, car il avait déjà évoqué cette possibilité lors de son escapade guyanaise, il y a quelques semaines.

Il y a deux écoles pour interpréter cette sortie. Celle qui y voit une faute politique et communicationnelle, constituée par le simple fait d’évoquer sa possible défaite. Et puis celle – à laquelle je souscris – qui interprète ce geste comme un coup, risqué certes, mais cohérent avec l’actuelle séquence politique du candidat sortant.

 

Quels bénéfices peut-il en attendre ?

 

D’abord, s’humaniser. Le « politique professionnel » a mauvaise presse en ce moment plus que jamais en France. Cette mauvaise image est élevée au carré dans le cas de soupçons d’arrivisme et d’ambition dévorante, tares dont Sarkozy a été, et est sans doute encore, un des emblèmes dans l’esprit des Français. En expliquant que la politique peut n’être qu’un des épisodes de sa vie – et donc qu’il peut faire quelque chose d’autre – le candidat de la droite se rapproche de ses concitoyens. C’est la suite du mea culpa de Des Paroles Et Des Actes. Et peut-être aussi une façon de durcir l’opposition avec son rival socialiste, dont il rappelle souvent qu’il est d’abord un dirigeant de parti politique.

 

Ensuite, montrer l’importance qu’il accorde au choix démocratique des Français, au point de le sur-interpréter. « Si tel n’est pas votre choix, je m’inclinerai ». Personne ne lui demande de tout arrêter s’il n’est pas élu. Mais en procédant de la sorte, il montre que lui, l’autocrate fustigé, respecte plus que personne l’expression populaire. En cohérence avec la pratique  (gaulliste) du référendum qu’il entend par ailleurs promouvoir.

 

Enfin, dramatiser l’enjeu des dernières semaines de campagne, en inversant d’une certaine manière le référendum anti-Sarkozy qu’il craint au second tour de l’élection. En expliquant aux électeurs que voter contre lui, c’est mettre un terme à sa carrière politique, Nicolas Sarkozy passe de bourreau à victime. Voter contre lui n’est plus un geste libérateur, un geste de ras-le-bol, mais un meurtre symbolique. Voulez-vous vraiment tuer l’homo publicus Sarkozy ? Une pression qui, à défaut de s’exercer efficacement sur les antisarkozystes virulents à gauche, peut au moins contribuer à resserrer un peu plus encore les boulons dans son propre camp.

 

Romain Pigenel

Les caractères de la politique (6) : Carla Bruni, la Marie-Antoinette #noussommesdesgensmodestes

« Nous sommes des gens modestes ! ». C’est le cri du cœur de Carla Bruni, épouse Sarkozy, accompagnant son président de « mon mari » sur le plateau de Des Paroles Et Des Actes. Re-contextualisons. Le début de l’émission se fait sur les fautes symboliques de début de mandat du président sortant, Fouquet’s, yacht Bolloré et tutti quanti. Un journaliste du Monde a pu se faufiler dans la loge de la première dame et suivre ses réactions en direct. Elle prend, fort logiquement, fait et cause pour son présidentiel conjoint, jusqu’à cette protestation rapportée de façon gourmande par le quotidien du soir, et qui fait depuis les délices du web : « Nous sommes des gens modestes ».

« Modeste » n’est pas une catégorie fiscale définie par la loi. Certes. Mais les mots ont une signification, et des connotations. Modeste n’est pas simple. La simplicité exprime un mode de vie, la modestie (dans ce sens) un niveau de revenu. On peut être riche, ou pauvre, et vivre simplement. Mais il ne viendrait à l’idée de personne de dire de quelqu’un de riche, qu’il a des revenus « modestes ». De deux choses l’une : soit Carla Bruni parle mal français, ce qui est fort peu probable ; soit ce n’est pas un défaut de langue, mais bien d’échelle des valeurs, qui explique sa curieuse sortie. Ce qui est un tantinet plus problématique

 

Un article du Figaro de 2008 – source non bolchévique et donc plutôt fiable en la matière – estimait le patrimoine de la première dame à 18,7 millions d’euros. Le patrimoine moyen d’un ménage en France est de 150 000 euros, moyenne cachant de fortes disparités (moins de 10 000 euros pour un ouvrier non qualifié !). Estimer qu’une fortune personnelle – sans prendre en compte les biens de Nicolas Sarkozy – plus de cent fois supérieure à la fortune « moyenne » d’un ménage français fait de vous une Française modeste, c’est avoir un grave problème de perception de la réalité sociale de son pays. Distorsion qui prend encore plus de poids, et de caractère choquant, en période de crise et de chômage de masse.

 

Carla Bruni n’est pas la première à « faire le job » maladroitement pour contrer l’image bling bling du président. Estrosi, il y a peu, tentait de repeindre le Fouquet’s en « brasserie populaire », tandis que le fidèle Guéant se lamente à présent sur la « vie d’une austérité extrême » du président des riches. Ces deux commentaires relèvent de manière si évidente de la grossière propagande qu’ils en deviennent plus grotesques que choquants. A contrario, c’est l’impression de naturel et de sincérité qui émane de la phrase volée de Carla Bruni, telle qu’on nous la rapporte, qui crée le malaise. Dans l’intimité, elle pense réellement appartenir à la catégorie des Français modestes. Que connaît-elle, que comprend-elle du quotidien de ses concitoyens ? Est-elle à ce point coupée du monde extérieur aux arrondissements dorés de l’Ouest parisien ?

 

On voit ainsi se dessiner un cocktail explosif que les communicants de Nicolas Sarkozy feraient bien de surveiller de près. Compagne très en vue + ayant exercé des métiers considérés comme frivoles + s’engageant nettement dans la campagne + suspectée de mœurs dispendieuses + révélant une inconscience globale de sa situation, et de la perception que peuvent en avoir les Français. Ce profil correspond à celui d’une figure honnie de l’histoire de France et du folklore républicain : Marie-Antoinette.

 

Le problème n’est pas d’être riche, ou de vivre de manière aisée. Le problème est de ne pas se rendre compte de sa situation privilégiée, et de le dire en toute ingénuité. C’est le propre de la Marie-Antoinette, à la différence, par exemple, d’un flambeur provocateur (Gainsbourg brûlant un billet de banque) ou d’un Tartuffe se faisant passer pour pauvre sans l’être. Le flambeur et le Tartuffe ont ceci de commun avec « les gens » qu’ils connaissent tous deux la valeur de l’argent, le Tartuffe l’instrumentalisant tandis que le flambeur la transgresse à dessein. La Marie-Antoinette, elle, avoue sans même s’en rendre compte qu’elle appartient à un autre système de valeurs, et donc à un autre monde, que le nôtre.

 

Dans une période où la tolérance envers les privilèges et les inégalités est à son plus bas, il n’y a probablement pas de façon plus directe pour devenir une tête de Turc honnie. Et ruiner les laborieux efforts présidentiels de déblingblingisation.

 

Romain Pigenel

 

La galerie des caractères de la politique se visite ici.

[TENDANCE] Le halal, priorité des Français : l’OPIF conforte Sarkozy

La déclaration de Nicolas Sarkozy lundi sur la « question de la viande halal », qualifiée par lui de « premier sujet de préoccupation, de discussion des Français », a provoqué un début de polémique sur fond d’incrédulité. Pourtant, c’est bien une priorité hexagonale, confirmée par la dernière étude de l’institut OPIF pour le collectif Bouchers, Charcutiers, Bovidés et Gaullistes (BCBG) et l’Organisation Centrale de la Boucherie (OCB).

Selon cette étude réalisée entre les 5 et 5 mars par questionnaire auto-administré dans les boucheries traditionnelles d’Ile-de-France (méthode des quintaux), 80% des Français souhaiteraient entendre plus parler du halal dans cette campagne, 95% d’entre eux le classant comme premier sujet d’importance pour l’avenir de la France, devant le casher et la boucherie chevaline. 78% d’entre eux se plaignent également du manque de radicalité de Marine Le Pen sur la question, tandis que 98% aimeraient avoir plus d’informations sur les positions comparées d’Eva Joly et Nathalie Artaud sur le sujet.

 

Fait intéressant et inédit, un lien est établi entre la participation à la présidentielle et la place du halal dans le débat public. A la question de savoir si une place plus centrale du halal dans le programme des candidats pourrait les conduire à aller voter, 85% des abstentionnistes répondent positivement, chiffre qui s’élève même à 97% si le vote s’accompagne d’une dégustation de viande ou de la remise de bons d’achat d’une valeur équivalente.

 

L’étude OPIF, utilisant la nouvelle méthode du trolling (un même échantillon de sondés, renouvelé 1 par 1 par tranche de 2 minutes), teste ensuite les priorités comparées des Français au regard du halal. 76% des Français préfèrent avoir accès à de la viande non-halal qu’à un logement, chiffre qui reste stable si on regarde la population des sans-logis. 81% d’entre eux placent la connaissance du mode d’abattage de la viande devant la réussite scolaire et professionnelle de leurs enfants. 69% sont prêts à abandonner leur emploi si on leur garantit que les moutons et les bœufs seront étourdis avant de finir dans leur assiette. Enfin, 65% seraient disposés à se convertir à l’Islam si on mettait fin aux traditions ancestrales d’abattage des animaux, proportion qui atteint 86% chez les Témoins de Jéhovah (0,0006% de l’échantillon testé) et 99% chez les animistes (non testé).

 

L’étude OPIF comporte ensuite une partie plus qualitative, où l’on propose aux sondés de donner les 5 mots qui leur viennent spontanément à l’esprit quand on leur parle du halal. 4 termes se distinguent assez nettement : « allo », « Lalanne », « aïoli », « police d’Etat ». Viennent ensuite, ex aequo, « kangourou » et « consonne ». Les autres réponses reçoivent trop peu de suffrages pour être significatives.

 

L’étude s’intéresse pour finir au lien entre intentions de vote et habitudes alimentaires des candidats. Une nette majorité des sondés (64%) déclarent préférer connaitre le régime alimentaire des candidats (halal / non halal) que leur programme, y compris leur programme sur le halal (75%). 91% affirment par ailleurs que c’est un choix définitif, qui pourrait néanmoins changer en cas de changement (54%).

 

Romain Pigenel, pour l’Agence de Presse Variae. Détail du sondage disponible chez votre boucher/charcutier.

Les mots de la politique (26) : « l’intuition » de politesse de Jean-François Copé

C’est une information politique majeure, et on peut s’étonner qu’elle ne fasse pas plus la une des journaux et les premières parties des JT. D’autant plus qu’elle émane du grand patron de l’UMP en personne, « Monsieur Tronçonneuse », le pourfendeur des « minables », j’ai nommé Jean-François Copé. Or donc, le grand manitou de Meaux s’est fendu dimanche, lors de l’émission C Politique, d’une révélation capitale : « Vous voulez mon intuition? Ça n’est pas prédictif, (…) c’est juste une intuition : c’est Nicolas Sarkozy qui va être élu ».

 

Prenons le temps de méditer ces propos. On peut déjà saluer le fairplay de l’ancien meilleur ennemi de Nicolas Sarkozy, qui, au bout d’une semaine noire pour le président sortant, fait ce qu’il peut pour lui donner malgré tout une note positive. C’est très sport. Certains esprits chagrins ne manqueront pas de souligner qu’il n’a pas vraiment le choix, que sa position de chef de parti, voire les soupçons qui pèsent sur sa loyauté, l’obligent à redoubler d’ardeur ou du moins d’affichage de cette ardeur. Certes. Mais c’est assez bien fait, avec même la petite touche de prudence – son intuition n’est pas prédictive, précise-t-il au cas où nous nous en inquiéterions – qui évite de laisser penser qu’il en fait quand même un peu trop.

 

Soyons, gens de gauche, beaux joueurs à notre tour, et reconnaissons au député l’invention d’une nouvelle forme de soutien ou de propos militant : « l’intuition de politesse », qui ajoute un barreau à l’échelle de l’enfumage.

 

Appelons enfumage la technique politique élémentaire consistant, pendant une campagne électorale, à commenter sur les plateaux de télévision, sur le web ou dans les colonnes des journaux la puissante dynamique que l’on voit se former, de façon souterraine, en faveur de son favori. Selon la situation réelle et les indices empiriques, on a plus ou moins les mains libres pour enfumer, comme le montre l’échelle de l’enfumage :

 

Stade 1 – Sondages en poupe. C’est la situation actuelle de François Hollande. Pas grand chose à faire ou dire : pour le favori, il convient de la jouer modeste, et de répéter encore et encore qu’un sondage ne fait pas une élection, au contraire. Ses adversaires se consolent en traduisant le moindre micro-affaiblissement de sa courbe comme le signe d’une stagnation, ou pire, d’une terrible chute à venir. C’est le fameux “trou d’air“.

 

Stade 2 – Sondages serrés, scrutin disputé. C’est là qu’entrent en jeu les observations de terrain. Certes, les chiffres des différents candidats sont proches, mais vous voyez bien, sur le terrain, qu’il se passe quelque chose. Les électeurs vous arrêtent dans la rue pour vous dire qu’ils vont voter pour votre camp ; votre boucher, électeur depuis 40 ans du camp d’en face, vous a fait la confidence de son revirement en votre faveur, ce coup-ci. Bref, ça bouge.

 

Stade 3 – Décrochage dans les sondages. Vous avez beau y faire, vous rendez quelques points de trop à votre adversaire. Il convient alors d’employer le registre de la surprise : ceux qui se voient trop beaux vont avoir un réveil difficile le soir du scrutin. Vous voyez, comme au stade 2, les choses bouger en votre faveur sur le terrain, mais votre adversaire, trop parisianiste, trop coupé de la vraie France, n’est tout simplement pas en mesure de le voir – comme les sondeurs. Un nouveau 21 avril se prépare, et ce ne sera pas faute de l’avoir dit !

 

Stade 4 – Situation sondagière désespérée. Il est temps de passer à un autre registre, celui des sondages « bidons », « aveugles », « truqués », aux mains de telle ou telle puissance financière proche de votre adversaire, voire du « système », comme dirait le camarade Hortefeux. Pour mobiliser vos troupes, il vous reste ce mot d’ordre dont le panache le dispute à l’absurde : « nous allons battre les sondages ! ».

 

Où se situe l’intuition de Jean-François Copé ? Quelque part entre les stades 3 et 4, probablement. L’idée-même d’une intuition quasi magique (il doit préciser qu’elle n’est pas « prédictive » !) implique l’absence d’indices concrets, sur le terrain, d’une possible remontée éclair du président sortant. On s’en remet donc au doigt mouillé – même pas – à l’intime conviction – non, c’est encore trop fort – ou juste à une sensation qui vous gratouille au fond de votre encéphale, si vous faites un gros effort de concentration.

 

C’est dire.

 

A se demander si l’intuition de politesse n’est pas, tout au fond, mais vraiment vraiment vraiment vraiment tout au fond, alors, une manière polie de poignarder dans le dos le candidat du Fouquet’s, ou de commencer à se désengager d’un bateau qui tangue de plus en plus. Quelle horreur ! Je n’ose y penser.

 

Romain Pigenel

 

Tous les autres mots de la politique : ici.

Claude Guéant s’acharne contre les Musulmans … mais aussi contre les Grecs

Il y a la campagne présidentielle, et puis il y a le « Guéant tour ». Un show un peu malsain, où l’on observe un grand commis de l’État en service commandé, pas particulièrement soupçonnable (même si on finit par s’interroger) de xénophobie ou de tropisme lepéniste au départ, mais qui « mouille le maillot » en faisant le sale travail pour son candidat et ex-patron. Le sale travail : voler des parts de marché à Marine Le Pen en multipliant les attaques contre les « étrangers », terme que l’on peut à peu près traduire par musulman intégriste, puisque les principales caractéristiques de « l’étranger » sont d’imposer le halal à l’école et de refuser la mixité dans les piscines.

Cette course à l’islamophobie finit cela dit par cacher une autre forme de mépris nationaliste tout aussi récurrente chez le Ministre de l’Intérieur. Sur ses petites fiches d’éléments de langage et d’arguments à marteler pour abrutir les électeurs, figure une saillie frappante qui resurgit aussi souvent que ses imprécations contre la viande halal : « La Corrèze, c’est la Grèce de la France ! ». La comparaison vise évidemment l’endettement de la Grèce et sa mise sous perfusion financière, qui n’auraient d’égale que la situation périlleuse du département et du Conseil Général présidés par François Hollande. Guéant n’en finit plus de la filer, dans une interview au Parisien, en déplacement en Martinique, ou lors d’un meeting près de Nancy, vendredi soir.

 

Le Monde a récemment opéré une « désintox » très complète sur cette allégation de la droite. Je ne reviendrai donc pas sur le fond de la comparaison. Mais c’est la forme qui devient, à la longue, de plus en plus choquante. Le sauvetage de la casa UMP justifie-t-il tout, jusqu’à transformer le nom d’un pays voisin et ami en insulte ?

 

Chacun connaît les problèmes de la Grèce. Mais, sans exonérer nos voisins européens de leur responsabilité dans leur malheur actuel, on ne peut qu’être frappé par l’usage que fait Guéant de leur nom. La Grèce, dans sa bouche, devient strictement synonyme de mauvaise gestion, de gabegie financière et administrative, et enfin d’immaturité pure et simple, puisque le ministre en campagne insiste toujours sur la mise sous tutelle du pays par le FMI.

 

Guéant a de la chance : tout le monde a tellement intégré que les Grecs sont d’odieux paresseux, fraudeurs, corrompus, et que l’Europe risque par leur seule faute de plonger, que personne ne remarque plus le mépris d’un des plus hauts représentants de l’État envers un autre pays européen. Ni ne s’en émeut. Autant Guéant choque sur les Musulmans, autant il se tient juste au niveau du ressentiment ambiant contre les Grecs, passant donc inaperçu. Mais que dirait-on si un ministre se mettait à utiliser l’Italie de la mafia comme symbole de l’insécurité (« Marseille est l’Italie de la France »), ou l’Angleterre comme étalon du risque des finances publiques ? Ah zut, ça a déjà été fait il y a quelques mois, par un certain François Baroin.

 

Au fond, Claude Guéant ne fait que dérouler et mettre en mots le mépris merkozien envers nos voisins hellènes. Mais il devrait être prudent : on ne foule jamais impunément aux pieds un orgueil national, fût-il actuellement plus bas que terre. A moins que Ministre de l’Intérieur et Président de la République ne se soient donnés comme but secret, après la controverse de la loi sur le génocide arménien, de réconcilier Grecs et Turcs dans un même courroux contre la France ?

 

Romain Pigenel

[URGENT] La folle nuit de Guéant à Nancy : la Corrèze, « c’est le Maghreb de la France »

NANCY, FRANCE. La nuit de vendredi fut longue pour Claude Guéant, en déplacement près de Nancy pour un meeting de soutien à Nicolas Sarkozy avec Nadine Morano. Selon l’AFP, cette réunion militante fut l’occasion d’une attaque en règle contre François Hollande et ses propositions. « Accepter le vote des étrangers, c’est la porte ouverte au communautarisme. Nous ne voulons pas que des conseillers municipaux étrangers rendent obligatoire la nourriture halal dans les repas des cantines, ou réglementent les piscines à l’encontre des principes de mixité », a ainsi fustigé le ministre de l’Intérieur, avant d’ajouter que « la Corrèze, qui est le département le plus endetté, c’est la Grèce de la France ».

La commission administrative de la Sainte Confrérie

La soirée de l’ancien secrétaire général de l’Élysée ne se serait néanmoins par arrêtée là, selon les informations de l’agence de presse Variae. Claude Guéant était en effet attendu ensuite pour la réunion annuelle de la « Sainte Confrérie Aryenne des Européens de Souche », société savante « historiographique et biologique » se consacrant, selon son site Internet, « à l’étude et à la préservation du génome nord-européen », ainsi qu’à « l’analyse et l’endiguement des bioflux trans-méditerranéens ascendants ».

 

L’association tient tous les ans son assemblée générale dans le sous-sol d’une brasserie nancéienne, où elle invite, pour un discours « de politique générale », une personnalité « qui a marqué l’année passée » par « son engagement remarquable » pour « l’intégrité du génome paléo-européen contre l’air du temps pro-biodiversité ».

 

Invité d’honneur cette année, Claude Guéant devait prononcer un discours intitulé, selon nos informations, « Toutes les civilisations sont égales … mais certaines plus que d’autres ». Mais après les rituelles « goulée de schnaps » et « noyade à la mirabelle » par lesquelles commence l’assemblée générale de l’association, le ministre, très en verve, se serait séparé de ses notes pour se lancer dans une libre réflexion dans le prolongement de son meeting du début de soirée. « La Corrèze, qui est le département où on trouve le plus d’Auvergnats, c’est le Maghreb de la France », aurait-il ainsi condamné, avant de mettre en garde l’assistance sur les dangers d’un vote Hollande. « Accepter le vote Hollande, c’est la porte ouverte à la grecquisation [sic] de la France. Nous ne voulons pas que des députés corréziens rendent obligatoires la moussaka et le gyros-frites dans les repas des cantines, ou transforment les piscines en lieux de débauche dignes de Mykonos », aurait-il affirmé avec vigueur, devant un public perplexe, mais attentif.

 

Très éprouvé par cet exercice intense et physiquement incapable de répondre aux questions de la salle, il aurait ensuite été ramené à son hôtel par des membres du mouvement des jeunesse de la Confrérie, les « Crânes imberbes ». Le sort du ministre préoccupait en tout cas visiblement l’Élysée, Nicolas Sarkozy se fendant d’un tweet sur son compte officiel.

 

@NicolasSarkozy Quelqu’un aurait de l’aspirine pour Claude ? Please RT, même tard, chuis pas encore au lit.

 

Romain Pigenel, pour l’Agence de Presse Variae

[DEPECHE] Fiasco de Sarkozy à Bayonne : l’assistanat pointé du doigt

BAYONNE, FRANCE. A la suite du fiasco de la visite de Nicolas Sarkozy dans la région de Bayonne, les responsables de l’UMP et de la campagne du président sortant, très choqués, essaient d’en comprendre les raisons. « Comment le candidat du peuple peut-il être aussi mal reçu par ce dernier ? », résume un dirigeant des Jeunes Populaires, en larmes, joint par téléphone.

Au siège de campagne du candidat, on accuse à mots couverts Michèle Alliot-Marie, qui recevait Nicolas Sarkozy comme “régionale de l’étape”. « Elle n’a pas été capable de sauver Ben Ali quand elle lui a apporté son soutien en matière de sécurité, comment pouvait-elle réussir ici à pacifier la zone visitée ? », critique un permanent de campagne, qui préconise pour les prochains déplacements de « plutôt prendre exemple sur le dispositif policier de Bouteflika », qui lui « est toujours à la tête de son pays ».

 

Mais c’est une autre explication qui est avancée au siège de l’UMP. « Nous avions, comme d’habitude, passé des annonces pour recruter un public professionnel pour la visite, mais nous n’avons eu aucun retour », explique, dépité, un secrétaire national du parti présidentiel. « Ce n’est pas faute d’avoir multiplié les offres d’emploi, à Pôle Emploi, dans les agences d’intérim, sur les sites spécialisés ».

 

Deux annonces avaient été passées, l’une pour un couple d’agriculteurs, l’autre pour une foule de « joyeux Basques à béret » scandant « Sarkozy, Sarkozy » et devant lui offrir des jambons, « et non pas des pains comme il en a finalement reçus », se désole un des organisateurs du déplacement du candidat-président.

 

Dans l’entourage de Laurent Wauquiez, spécialiste du peuple, on condamne les chômeurs qui ont « du haut de leur assistanat snobé ces offres généreuses, bien payées et ne requérant pas de qualification particulière », si ce n’est une « certaine aptitude à la veulerie ».  « Les syndicats se plaignent de l’actuel record de 3,4 millions de Français au chômage, mais que disent-ils d’une telle situation », où « plus de 100 postes » ne trouvent « pas preneur » ? Avec le référendum sur les demandeurs d’emploi que propose Nicolas Sarkozy, « heureusement », de telles « absurdités » seraient conduites à disparaître.

 

« L’assistanat ne ronge pas seulement la valeur travail, il peut aussi conduire par ricochet à affaiblir l’ordre national », remarquait dans la soirée un député membre de la Droite populaire, avançant l’hypothèse que les manifestants aient pu, justement, être des « chômeurs désœuvrés », préférant « répandre la chienlit » que contribuer à un « accueil chaleureux et rémunéré du président ».

 

Pour la prochaine sortie de Nicolas Sarkozy, en cas de nouvelle incapacité à recruter des figurants, son cabinet envisagerait à présent de détourner des bus de ramassage scolaire ou de réquisitionner des centres aérés pour préparer un accueil plus cordial, par des enfants, pour le président sortant. Le dossier a été transmis au ministère de l’Éducation Nationale.

 

Romain Pigenel, correspondant de l’Agence de presse Variae

Les mots de la politique (25) : Hollande, les super-riches et le « point Dujardin »

Définition. Est appelé « point Dujardin » le point vers lequel tend toute conversation vérifiant les prémisses de la « loi de Dujardin ».

Loi de Dujardin. Etant donnés deux individus conversant au sujet de la sur-taxation des « riches » et par exemple de l’impôt « 75% » proposé par François Hollande. Si au moins un des deux individus est sensible au droit des millionnaires à s’acheter des plages privées, des yachts et à faire travailler une ou des clones de Zahia, alors la chance qu’il cite Jean Dujardin croit proportionnellement à la durée de la conversation. On appelle « point Dujardin » l’instant TD où le nom de Jean Dujardin (NDLR : acteur français exportable – synonyme : Marion Cotillard à moustache) est évoqué. On considère alors généralement que la discussion est terminée et que les débatteurs peuvent se séparer, toute perspective de compromis étant à partir de là très improbable.

 

Point Dujardin. La citation de Jean Dujardin suit un schéma à peu près immuable. Alors que le premier individu tente d’argumenter sur la nécessité d’une redistribution sur fond de justice sociale, et sur les bienfaits d’un impôt sur le revenu très progressif, le second individu l’interrompt en lui faisant remarquer que si François Hollande arrivait au pouvoir et instaurait la taxation à 75% au-delà du million de revenus, alors Jean Dujardin, fraichement oscarisé, pourrait très bien quitter l’Hexagone « pour s’installer dans une contrée plus clémente ».

 

Variantes. La loi de Dujardin connaît quelques variantes qui, au nom près, fonctionnent de manière raisonnablement semblable. On admet ainsi l’existence d’une loi de Pastore (Javier de son prénom), selon laquelle le risque d’évocation du départ de Javier Pastore du PSG croit proportionnellement à l’échauffement des esprits dans un débat sur la réforme fiscale.

 

Remarques. Il est strictement déconseillé de tenter, une fois le point Dujardin ou Pastore atteint, de relancer la discussion, au risque de la voir basculer dans l’hystérie, voire de la faire tomber sous le coup de la loi de Godwin et d’enchaîner point Dujardin et point Godwin.

 

Exemple de tentative de continuation au-delà du point Dujardin. – Dujardin de toute façon il a eu son Oscar avec un film sur l’Amérique tourné aux Etats-Unis, alors qu’est-ce que ça change s’il s’expatrie, et puis il restera quand même français non ? – Si tous les talents quittent la France, notre pays va basculer dans le Tiers Monde ! – Mais on ne parle pas de « tous les talents », on parle d’un acteur !?! – Ton problème, c’est que tu n’aimes pas les riches, toi et François Hollande, vous êtes dans le racisme anti-riches, et on sait où ça mène, combien de morts le communisme déjà ? | POINT GODWIN (mention Staline).

Romain Pigenel

 

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