Quelle cible électorale pour la gauche ? C’est à cette question que Terra Nova entend répondre avec un rapport intitulé « Gauche : quelle majorité électorale pour 2012 ». L’argument central en est assez simple. La crise de la social-démocratie serait double : crise idéologique, mais aussi crise de la sociologie électorale. La gauche s’appuyait autrefois sur une « coalition historique » construite autour de la classe ouvrière ; mais les ouvriers sont un allié de moins en moins sûr, du fait de leur démographie en baisse, de la déliquescence de leur conscience de classe et de leur conservatisme moral. Or la gauche, elle, se définit de plus en plus par le libéralisme « sociétal », dans la foulée de mai 68, et ne peut plus répondre aux demandes économiques des ouvriers. Elle devrait donc faire le grand plongeon, consistant à se détourner de cette assise électorale dépassée pour embrasser sa nouvelle famille, divisée sur les intérêts économiques mais unie sur « les valeurs » : c’est-à-dire l’alliance des diplômés, des jeunes, des « minorités et des quartiers populaires », des femmes, des urbains et des « non-catholiques », qui sont tous tournés vers « l’avenir » et rompus aux joies du libéralisme culturel.
Il faut reconnaître à Olivier Ferrand (coordonnateur de ce rapport) un certain courage, celui de dire avec franchise, voire candeur, ce qu’un courant de pensée pense toute bas depuis quelques années ; à savoir que la gauche doit rompre à la fois avec ses attaches ouvrières et populaires, et avec sa volonté de transformation économique. Il mène à son terme, et théorise, le recentrage de la gauche autour du libéralisme de mœurs ; il ouvre un débat clair sur l’avenir et l’objectif de la social-démocratie, nettoyé de tous les faux-semblants et politesses d’usage. Mais ce sont bien là, malheureusement, les seuls mérites que l’on peut reconnaître à ce texte.
Passons, par charité, sur les nombreuses imprécisions et incohérences qui émaillent le rapport. Le sens exact des termes « classes populaires » ou « classes moyennes » fluctue de chapitre en chapitre. Par ailleurs, on nous explique à la fois que la nouvelle coalition incontournable pour la gauche – la « France de demain » – est en pleine progression électorale, mais aussi qu’elle n’est pas actuellement majoritaire, et qu’il faudra lutter contre son abstention structurelle (pour les jeunes notamment). Bref : si on rend la nouvelle coalition majoritaire, alors elle le sera (si ma tante en avait …). Autre perle du même genre, on peut expliquer dans une page que les séniors votent « toujours » à droite, pour affirmer sans ciller, un peu plus loin, qu’ils vont voter « de plus en plus à gauche ». Et que dire des hésitations démographiques sur l’ancienne « coalition historique » du PS, qui est à la fois décrite comme en déclin (ce qui devrait justifier son abandon), et comme en hausse numérique (du côté des petits employés) ?
Plus problématique est la méthode employée pour découper la société en catégories favorables (ou non) à la gauche. Le groupe de travail Terra Nova, confondant cause et conséquence, inspecte les facteurs déterminant le vote de gauche aux dernières élections, et en tire, au petit bonheur la chance, un inventaire à la Prévert de catégories mélangeant genre (les femmes), origine (les immigrés), âge (les jeunes), diplôme (les diplômés du supérieur) et situation professionnelle (les CSP+) – heureusement que les sondages n’ont pas révélé un tropisme socialiste des unijambistes moustachus, ils auraient probablement gagné leur ticket d’entrée parmi les membres fondateurs de la « France de demain ». Ces catégories, hétérogènes, se recoupent et se contredisent les unes les autres : les femmes votent à gauche, lit-on, mais pas les employées, apprend-on plus loin ; et faut-il aussi leur appliquer le diagnostic général sur cette nouvelle alliance, à savoir qu’elle a une démographie trop faible – nait-il moins de femmes que d’hommes en France ?
Ce ne serait encore rien si ces catégories n’étaient définies à (très) gros traits par des caractéristiques tenant plus du préjugé bobeauf que de la rigueur scientifique : l’immigré et le jeune sont ouverts et « optimistes », ils représentent « la dynamique », alors que l’ouvrier est dans « le repli » contre « les immigrés, les assistés, la perte des valeurs morales [lesquelles ?] et les désordres de la société contemporaine [est-ce une tare ?] ». Il est vrai que « plus un individu est diplômé, plus il adhère aux valeurs culturelles de la gauche », et parmi elles la « tolérance » et « l’ouverture aux différences culturelles ». Moins vous faites d’études, plus vous êtes con et méchant, en clair. Que ceux qui n’ont pas décroché un master lèvent le doigt ! L’argument d’autorité et le mépris culminent avec le titre donné à la nouvelle alliance électorale proposée – « la France de demain » – titre qui suggère très explicitement que ceux qui n’en font pas partie (les ouvriers et employés) sont à ranger au rayon des rebuts dépassés par l’histoire.
A la caricature s’ajoute, fort logiquement, le naturalisme : on décrit les évolutions électorales de ces catégories de population comme des phénomènes physiques inaltérables, sur lesquels la gauche n’aurait finalement aucune latitude d’action, et dont elle devrait juste prendre bonne note pour ajuster sa stratégie. Le texte ne se demande jamais, par exemple, si la dérive des classes populaires vers des valeurs « de droite » n’est pas en partie de la responsabilité de la gauche, si celle-ci ne pourrait pas enrayer ou inverser le processus, et si la stratégie Terra Nova ne va pas simplement amplifier les conséquences d’erreurs commises par le passé. A vrai dire, l’idée même d’un parti de masse, capable de peser sur la société, et de faire un travail de terrain de longue haleine auprès de ces populations, semble inconcevable pour Terra Nova ; prenant peut-être le cas des think tanks pour une généralité, le groupe de travail n’évoque jamais la dimension militante ou d’éducation populaire, si ce n’est pour parler du porte-à-porte qu’il faut faire « comme Obama » pour aller chercher les abstentionnistes de la jeunesse ou de la « diversité ». On reconnaît du bout des lèvres que Ségolène Royal a limité les dégâts sur le vote ouvrier en 2007, grâce à « son positionnement spécifique » … mais on n’en tire aucune conclusion.
C’est plus largement l’idée même de transformation économique du pays qui est balayée d’un revers de main. On explique tranquillement que les ouvriers ont abandonné la gauche parce qu’elle a renoncé à toute ambition de rupture économique, et qu’ils votent à l’extrême-droite parce que le FN façon Marine a un programme social … « de gauche ». Pas grave, la gauche va se recentrer sur les valeurs morales et « sociétales » ! Un curieux plaidoyer pour Tony Blair et sa Grande-Bretagne post-industrielle clôt le document, en annexe ; et on suggère par ailleurs qu’il ne faudra pas trop cogner sur l’épargne et les héritages, si on veut capter le vote des classes moyennes. C’est quasiment une rhétorique de droite, enfin, qui est employée pour décrire l’opposition entre « insiders » et « outsiders » : puisque les inclus (dont les ouvriers) ne veulent pas revoir leurs privilèges à la baisse, la gauche doit s’appuyer sur les exclus (là encore on mélange discriminations professionnelles envers les femmes, les jeunes, les étrangers …), moins exigeants et partant de plus bas, pour prendre le pouvoir – en taillant, on l’imagine, allégrement dans les dépenses sociales occasionnées par les premiers.
Au fond, on comprend mieux, avec ce document, pourquoi Terra Nova se réclame plus du « progressisme » que de la gauche : alors que la gauche se définit à la fois par un ancrage populaire, un projet économique et social, et un ensemble de valeurs (morales et culturelles), le progressisme prôné par le think tank abandonne largement le premier, revoit à la baisse le second, et ne s’accroche vraiment qu’au troisième. La vision proposée par la fondation « progressiste » est sans doute respectable, mais elle n’est pas de gauche, au sens commun du terme. Elle est une sorte de projection des fantasmes de la bourgeoisie éclairée (!) et humaniste sur le reste de la société. Elle est surtout à courte vue : il faut être bien naïf pour croire que l’on gagne une élection en faisant une arithmétique d’épicier, en ajoutant à la bonne franquette des haricots, des choux et des tomates pour arriver aux « 50% » fatidiques. Tout l’art de la politique consiste à bâtir des projets nationaux qui dépassent les antagonismes, et donnent des perspectives communes à des populations n’ayant pas forcément, au départ, d’intérêts communs. La proposition portée par Terra Nova, a contrario, ne peut générer que confusion, division, et défaite.
Romain Pigenel
30 Comments
tout à fait d’accord avec l’ensemble de votre texte, ce rapport est d’une nullité affligeante. S’en inspirer serait dangereux.
CQFD Terra Plapla! Tu m’as donné envie de lire les annexes. Je vais m’attaquer à la version complète maintenant.
Terra nova, on dirait le titre d’un chef d’œuvre de Steven Seagal.
On va éviter, pour l’instant (néanmoins, curieux comme tout, j’irai jeter un coup d’œil dès qu’un peu de temps).
Merci pour le billet.
Je trouve, en toute amitié, que vous tapez un peu fort Ronald et toi.
Certes le rapport est truffé de contre-sens et d’approximations qui tentent de donner un vernis “marketing électoral” à une démarche initiée par des énarques pour qui l’exercice est hors compétence mais, il a le mérite d’exister. Il s’appuie sur des études réalisées par le PS dont personne ne parle jamais et qui mettent en évidence le décalage considérable entre les “éléments de langage” Solfériniens et la réalité sociologique tant de l’électorat de gauche que des militants et, par voies de conséquences, de la représentation nationale.
Que le FN se soit saisi de l’information ne devrait surprendre personne, la campagne qui se lance sera riche de bien d’autres coups tordus et la gauche ne sera pas la dernière à la manœuvre.
D’autre part mettre en opposition “progressisme” et “vraie gauche” est un procès d’intention aux tenants un peu faiblards. Personne n’ignore que Terra Nova qui compte plus de 300 “experts” est essentiellement composé (à 50%) de hauts fonctionnaires, un tiers d’Universitaires et une portion congrue de “société civile” (dont je suis). Aucun représentant du monde ouvrier….
Dans l’idée Terra Nova le terme “progressiste” est destiné à couvrir le champs complet de la gauche jusqu’à, et y inclus, le centre (type Modem). En réalité la présence d’adhérents du PS est écrasante et une majorité d’entre eux roule pour DSK.
D’autres articles sont parus qui signalent d’autres publications traitant du même problème avec une stratégie opposée à celle suggérée dans ce rapport. L’approche est ouverte et ce sera intéressant de voir le positionnement pris par les candidats dès les primaires sans se tirer des balles dans le pied…
Merci d’avoir dénoncé le néopaternalisme de Terra Nova.
Olivier Ferrand et Terra Nova, ne sont-ce pas les instigateurs (avec Montebourg) de ces fameuses primaires à gauche. Ces primaires qui pour l’instant sont plus le révélateur des ego et antagonismes chez les ténors du PS.
En tout cas belle annalyse !
et par curiosité, sais-tu de quoi vit Terra Nova ?
cdlt,
excellent papier. reste à se demander si faire le choix de l’europe ne conduit pas nécessairement à un positionnement terranovien : plus d’industrie, politiques économiques verrouillées car centralisées, ergo, il ne reste que le sociétal.
Terra Nova est une fondation qui regroupe des chercheurs allant du centre aux lisières de la gauche dure.
Olivier Ferrand, si il pose un défaitisme d’entrée, et tu as raison, pose des question qui sont intéressantes: Quel est le type de personne qui vote à gauche ? Faut-il continuer à jouer sur les racines ouvrières ou y’a t il autre chose ?Il préconise une coalition façon gauche américaine dans le Kansas par exemple, où les ouvriers votent à droite. Ce que tu dis sur sur le vote ouvrier qui n’est pas à laisser au FN est très juste par contre et je pense que l’on ferait une erreur en abandonnant les classes populaires.
Mais par contre il faudra des évolutions qui ne seront pas toujours dans le sens pensé par des Emmanuelli et des Hamon.
dans ton billet sur DSK j’interrogeais sur la capacité de celui-ci à être le candidat de toute la gauche, alors que ses positions économiques étaient plutôt de droite.
Le rapport de Terra Nova sonne comme une tentative de réponse à cet argument…
@Lucie : je pense en effet que “dangereux” est le mot qui convient. Quand on préside une fondation qui a pignon sur rue, on a un devoir de responsabilité.
@nico93 : Terra Novadanslemur.
@El Fredo : c’est le mot …
@Corto74 : en effet, ils sont (co)responsables de pas mal de conneries récentes du PS … Sur le financement il y a cela : http://blogdejocelyne.canalblog.com/archives/2010/03/20/17300862.html
@Edgar : faire le choix d’une CERTAINE Europe, on va dire
@Alain : je n’oppose pas “progressisme” et “vraie gauche”, je constate juste que TN essaie de détourner à son avantage le concept de progressisme, et dans un sens clairement “droitier” (on est loin du progressisme sud-américain !). Par ailleurs il serait probablement intéressant de se pencher sur la sociologie des “experts” du think tank, mais c’est une autre histoire. Pour en revenir à l’étude, je ne conteste pas le paysage qu’elle trace, mais je trouve aberrantes les conclusions qui en sont tirées. C’est vraiment “vous avez mal à la tête, alors je vais vous couper la tête” ! En gros on théorise le fait qu’il vaut mieux fuir les problèmes que les affronter … c’est quand même fort.
c’est là que l’europe est un piège vertigineux : les institutions de l’UE font qu’une europe autre est impossible. de gaulle s’est déjà cassé le nez alors que l’UE ne comptait que 6 membres. à 27 membres (and counting) il n’y a pas de réforme de l’union possible autre que minimaliste.
en sortir est le seul moyen !
le discours sur l’europe autre est satisfaisant pour la conscience mais voué à l’échec !
Le document, signé par Jeanbart et Ferrand et publié par TerraNova, peut être analysé pour lui-même, et Romain P en souligne quelques éléments très contestables voire franchement comiques, ou être observé dans son contexte, i.e. en y adjoignant le rôle et la place de ses scripteurs et le moment de sa publication. Il y faudrait du temps et beaucoup d’abnégation pour expliquer et apporter les preuves détaillées : en un mot, la thèse de ce groupe de travail est “réactionnaire”. Ne pouvant et ne sachant comment relier la trajectoire d’un socialisme démocratique plus que centenaire à nos traumatismes sociaux contemporains, ce petit groupe enjoint le Parti Socialiste de rejeter toute perspective de représenter les classes sociales les plus modestes qu’il ne comprend pas.
Bref, ce texte doit être immédiatement et vigoureusement rejeté par le PS. En l’état, il pèse plus lourd par sa légèreté et son irresponsabilité politiques que n’importe quel symbole automobile.
À bon entendeur, salut !
pourquoi faire une fixation sur la classe ouvrière. Elle n’existe plus vraiment. Ceux qui ont un travail gagne relativement bien leur vie compte -tenu des diplômes qu’ils possèdent et se fout pas mal de ceux qui sont plus bas qu’eux dans l’échelle sociale.S’ils ne votent plus, c’est qu’ils ne croient pas au changement de politique entre gauche et droite. Ils profitent de la vie au jour le jour.
UNIVERSITE POPULAIRE PARTICIPATIVE (UPP) « GAUCHE – CLASSES POPULAIRES :
LE DIVORCE ? » Villiers sur Orge (Essonne),
salle des fêtes René Vedel, place du 19 mars 1962 14 mai 2011 – Accueil à partir de 14 h 00
Avec
Farid Djitli, Président de l’association de défense de l’emploi Jean-Philippe Huelin, Géographe, co-auteur de Recherche le Peuple désespérément Jean-François Kahn, journaliste et écrivain. Dernier livre paru : Faut-il croire les journalistes ? Thierry Mandon, Conseiller général, Maire de Ris Orangis Jacques Rigaudiat, Magistrat et économiste, auteur de Le nouvel ordre prolétaire. et Dominique Bertinotti, Historienne, maire du IVème arrondissement
@blachier : plutôt DSK que Hamon et Emmanuelli, alors ? Dans ce cas, tu approuves ce rapport, qui va plutôt dans son sens. Et c’est abandonner l’électorat populaire, qui ne saurait se reconnaitre dans pareille figure…
@romain : j’aime ton optimisme et ton sens de l’équilibre. Tu fais un bon politique, à vouloir réconcilier les contraires en parlant de prendre de la hauteur au travers des intérêts collectifs. mais est-ce possible, dans un tel contexte de tensions entretenues, d’hostilités idéologiques réciproques ?
@ J P P : La classe ouvrière n’existe plus vraiment ? 30% de la population n’existent plus ? Ou ne serait-ce plutôt que les oligarques ont choisi d’ignorer délibérément 30% de la population ?
Je ne suis pas la logique de votre critique des “catégories héterogènes”:si “les femmes” votent “progressistes” et “les employeés” votent plutôt à droite, ça ne dirait pas que toutes les femmes votent ainsi,(donc: aucune femme peut étre employée) parce-qu’on parle de normes statistiques, pas d’individus. L’employée droitiste existe en dehors de ces normes. Rien ici d’”incohérent”: on distingue par plusieurs catégories à la fois, et chaque catégorie qui produit de la différence est utile, même si des contradictions existent au niveau individuel.En confondant norme et individuel vous éviter d’engager le report sur ses mérites, telles qu’elles soient.
Bonjour,
m’est avis que de nombreux socialistes vont “officiellement” dénoncer le rapport… mais vont quand même bien l’étudier pour… éventuellement… faire évoluer certains de leurs éléments de langage pour séduire ceux qu’il faut séduire… ;o)
m’enfin,
@+
PS : l’objectif c’est quand même de gagner les élections… c’est pas un concours de “beauté intellectuelle”…
@Edgar : pas entièrement d’accord. On voit bien en ce moment, dans le contexte de la crise, que des coups de canif sont régulièrement donnés dans le carcan européen actuel. Comme la situation ne va pas aller en s’améliorant (voire cas grec, etc.), je pense qu’un petit groupe de pays solidaires et décidés pourrait engager des réformes, quitte à casser l’Europe actuelle et aller vers une union à plusieurs vitesses.
@MJBB : je suis d’accord. Et ce texte est un très mauvais signal à ce moment de la pré-campagne, surtout à la suite de l’affaire de la Porsche.
@JPP : “S’ils ne votent plus, c’est qu’ils ne croient pas au changement de politique entre gauche et droite.” => même réflexion qu’à propos du rapport : peut-on s’en satisfaire ?
@Sandrine : je laisse passer pour une fois, mais ce blog n’est pas un mur d’affichage publicitaire. A bon entendeur …
@Guy : je pense que JPP voulait dire qu’elle n’existe plus comme groupe social homogène et conscient de lui-même, ce qui est assez exact.
@Bremt : mais non. Tout l’argument central du rapport consiste à dire que si on additionne un certain nombre de facteurs/catégories majoritaires (donc “femmes”, “immigrés”, etc.), on gagne forcément. Or dans le détail le texte reconnait lui-même que ces catégories se croisent et s’entre-restreignent largement ; par exemple l’immigré est tolérant … sauf contre les gays, la femme progressiste, sauf si elle est employée, etc. Au bout du compte on se retrouve avec une peau de chagrin électorale peu cohérente, alors que c’était sa cohérence et sa force numérique qui justifiaient initialement la “nouvelle alliance” !
@Nap : on est d’accord, la politique n’est belle que quand elle gagne. Mais je ne vois pas quelle piste sérieuse il y a dans ce rapport pour y arriver.
@Bertrand : oui, je me suis fait la même réflexion en lisant ton autre commentaire
@GdeC : je ne me demande même pas si c’est possible, je dis qu’il faut s’en donner les moyens, et les “boîtes à idées” comme TN devraient servir à inventer ces moyens … Au lieu de quoi elles nous vendent du saucissonnage électoral droitier et fantaisiste.
@Romain B : je suis d’accord, on ne peut pas rester sur des vieilles recettes, et il faut parvenir à donner du fond à une alliance de groupes sociaux semblable à celle prônée par TN, mais intégrant ouvriers et employés. Cela demande précisément de dépasser la barrière inclus/exclus sur laquelle achoppe le rapport. Comment y parvenir ? Si je trouve la réponse je me présente à la primaire
Les bobos votent écolos, les friqués ump, les ouvriers fn, les cathos Bayrou, les alcoolos Borloo, les naifs peut-être De Vil., les syndiqués pc ou fg si c’est bon, les sectaires trotskos et pendant ce temps là, Solfé se cherche et laisse la place aux kistes pour bien se développer dans toutes les cellules du parti. Quand le cancer sera en phase terminale, voter socialo ce sera comme se donner son propre coup de poing en pleine geule, comme dans Fight Club !
L’Assemblée Nationale comprend depuis longtemps 3% d’ouvriers-employés, alors que cette catégorie représente 1/3 de la population française adulte.
Le discours de Terra Nova n’est donc que la confirmation de l’abandon des classes populaires par le PS. En fait, ce qui transparait dans les études des think-tanks type Terra Nova, c’est que le PS a été progressivement confisqué par ses technocrates-conseillers, qui l’ont transformé à leur profit en une sorte de parti pour grands bourgeois éclairés. Il va de soi que le PS ne porte plus depsui longtemps les valeurs de progrès social de la gauche. Le parallèle est d’ailleurs frappant avec le blairisme.
Le PS a même réussi, par sa négation des les classes populaires, à provoquer l’alliance électorale improbable des ouvriers et des petits patrons, dans un vote populiste et droitier. C’est cette alliance qui a permis l’élection de Sarkozy. Elle qui risque de se reproduire en 2012 si les “bon bourgeois gavés” du PS ne se réveillent pas.
On pourrait même ajouter avec cynisme que les dirigeants socialistes jouent gagnant-gagnant à la prochaine présidentielle. S’ils remportent la bataille, ils seront aux affaires publiques. S’ils la perdent, ils continueront simplement à faire des affaires privées…
Triste époque pour les pauvres.
Terra Nova : superbe preuve de l’existence de la drauche (ou de la groite, chai pu et eux non plus).
Si je n’avais pas pris il y a quelques mois la décision de ne plus jamais voter ps, le rapport de ces Marie-Antoinettes m’y pousserait
Il est un peu facile de brûler Terra Nova dans son ensemble sur le lit de son dernier rapport… qui est certes assez digne d’une conversation mondaine au Mama Shelter. Ils ne pondent pas que des crétineries. D’accord avec certains commentaires précédents pour t’enjoindre, Romain, à ne pas opposer sèchement progressisme et gauche. Je suis très attaché aux deux termes et ne conçois pas leur séparation.
Le but de la gauche caviar (les TSSR) est de conserver leurs baronnies. Sarko sur le trône…la gauche caviar s’en moque…Les TSSR ont vite compris qu’il fallait faire perdre Ségolène Royal en 2007 en lâchant des boules puantes : on se souviendra notamment de celle de Hollande (j’aime pas les riches), de Montebourg (son mari est son défaut), de Jospin(elle n’a pas l’étoffe d’un chef d’État), de Fabius (son programme c’est « Voici » ndlr :le magazine!) et le bouquet final est Aubry qui ne fera pas sa campagne et qui votera Bayrou…Le calamiteux congrès de Reims en 2008 fut la suite logique…On vole une deuxième fois la victoire à Ségolène Royal !
@Japp : le premier qui me rebbassine avec la madone des sleepings, je sors mon fusil ! vous plaisantez ou quoi ?
@L’Argonaute : incompréhensible.
@Jojo1 : le fait même que Ferrand CONSEILLE au PS d’abandonner les ouvriers invalide votre commentaire …
@PMB : pas mal “drauche” et “groite”
@Christian : tu as dû mal me lire, et mal lire également ma réponse aux commentaires en question.
@Japp : un peu hors-sujet non ?
@Romain/Variae
Si je vous donne le nombre de députés issus des classes poulaires, ce n’est pas pour rien. Le fait même qu’il n’y ait DEJA plus de députés socialistes ouvrier invalide votre commentaire.
Peu importe les discours de Terra Nova. Son conseil au PS, en 2011, de rompre avec les pauvres (puisque c’est de ça qu’il s’agit) relève de l’enfonçage de portes ouvertes. Le PS a en effet déjà rompu depuis bien longtemps toute attache avec le monde ouvrier. Et le monde ouvrier lui a d’ailleurs rendu la monnaie de sa pièce au plan électoral en 2002 et 2007.
Le discours de Terra Nova devrait donc être “doit-on reconquérir le monde ouvrier”, plutôt que que “doit-on abandonner le monde ouvrier”.
@Jojo1 : il n’y a peut-être plus de députés PS d’origine ouvrière, mais il y a encore des électeurs… bref.
Depuis Mitterrand le PS a mis en oeuvre une stratégie de conquête du pouvoir passant par une réduction de l’influence du PCF sur la classe ouvrière en jouant notamment sur l’immigration. Tout le monde s’est employé du maoïste Badiou au journal Minute à la criminilisation du PCF et de l’URSS . Les sectaires , les liquidateurs du PCF et les opportunistes avides de ministères ajoutant à la décridibilisation des communistes auprès des masses. La mise en scène des frères ennemis PS et FN réalisée afin d’interdire au courant ouvrier la critique de l’immigration estampillée “raciste” ce qui a eu pour effet de rejeter la fraction de la classe ouvrière la plus exposée au dumping économique notamment vers le vote de la démagogique extrême droite. Les efforts du capital financier représenté aujourd’hui par le PS appuyé sur la petite bourgeoisie et les salariés protégés ont abouti à l’appel de “Terra Nova” à une situation à l’anglaise des années Thatcher en effet. Sauf que les Français ne sont pas les Anglais ce que Sarkozy a appris à ses dépens, sauf que La petite bourgeoisie entrevoit effarée que ses enfants vont subir le sort des ouvriers qu’elle a livrés autant par cécité que par calcul à son pire ennemi : la finance internationale. Au total le mécontentement gronde au sein des masses et Hollande est attendu au tournant !
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[...] sont un certain nombre, de Dagrouik à Marc Vasseur, en passant par Romain Pigenel et Thierry, à évoquer dans leur billet du jour en des termes peu amènes le contenu d’un [...]
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[...] avoir fait explosé leur bombe, les membres de Terra Nova, poursuivis, se sont réfugiés dans leur siège [...]
[...] de débutant encore, mais étrangère à DSK pour le coup, que la publication plus que maladroite d’un rapport Terra Nova, théorisant noir sur blanc l’abandon des ouvriers et employés blancs par le PS, à moins [...]
[...] récemment, le think-tank Terra Nova a tenté de transformer ce clivage en ciblage électoral. Les fameuses classes populaires dont le [...]
[...] en sorte que les classes populaires renouent avec le Parti socialiste alors que d’autres, autour de Terra Nova, prônent au contraire une rupture de la gauche avec ses attaches ouvrières et [...]
[...] Entre les analyses de Terra Nova ou les études de la Fondation Jean Jaurès, le débat est bien présent. [...]
[...] profusion d’études et d’ouvrages polémiques sur la question, en réaction, aussi, à la proposition d’un think tank en vogue de détricoter (pour aller vite) le lien entre gauche et prolétariat, [...]
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